Libération - 25 octobre 2005

Nosfell prend langue

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ar Gilles RENAULT

 

A défaut de prénom clairement identifié (Labyala, pour les intimes), Nosfell s'est sans conteste déjà fait un nom. Celui qui figure sur son premier album, et qu'il colporte en tournée, où le personnage en impose. Avis à tous ceux qui désespèrent d'entendre des choix artistiques originaux : Nosfell défend aussi un style et, tant qu'à faire, une langue ! De là à penser que l'individu se prend très au sérieux et pourrait même finir par agacer, à force de vouloir jouer systématiquement au plus malin Ñ cf. également une «bio» qui, comme si cela ne suffisait pas, entretient un bien fastidieux mystère autour de son parcours...

Quoi qu'il en soit, Nosfell n'est pas non plus une baudruche. Beau garçon élancé, il fait partie des lauréats de l'année 2005, avec un disque qui fouille tous les registres sans appréhension (rock, chanson, blues, folk, world...) et réussit, en treize chansons, à former un tout personnifié et cohérent. Pomaïe Klokochazia Balek se caractérise aussi par son jargon, le klokobetz (de la planète Klokochazia : là, ça commence sérieusement à ressembler à une communication sous acide des frères Bogdanoff), inventé par Nosfell, 118 ans après l'espéranto de Zamenhof et presque autant après le kobaïen de Christian Vander (from Magma).

Ce qui nous inspire deux réflexions : primo, c'est pas demain la veille qu'un concert de Nosfell (qui fait rimer sur scène guitare avec violoncelle) se terminera en karaoké géant au Stade de France ; secundo, le jour où le klabouschmurz sera entré dans le langage courant, chaque chanson vaudra un max de points au Scrabble. Tenez, rien que Slakaz Blehezim : 48 ­ encore qu'il manque un Z dans la boîte.