Nosfell : caméléon musical
Auteur, compositeur et arrangeur
de génie, Nosfell nourrit son « melting-folk »
dune langue imaginaire et sensuelle.Lentrée en
scène de Nosfell fait toujours son petit effet : crâne
rasé, pied nu, le corps couvert de tatouages, le gaillard filiforme
se faufile sur scène avec majesté. Le public sceptique
ouvre lil, sinterroge. Tel un chaman gracile, il
prend possession de la salle, rapidement hypnotisée par la
puissance de son organe. Une voix magique, surprenante, inimitable,
inclassable. Avec pour seul accompagnement, une guitare sèche
et discrète.
Mais ne vous méprenez pas. Le bonhomme na rien dun
gourou. Nosfell, en langue berbère, désigne celui qui
marche, qui guérit. Lartiste lui préfère
limage du griot : un musicien itinérant qui colporte
des informations, raconte des histoires. Car derrière la cuirasse
se cache un conteur de rêves. En suivant les pas de Saint-Ex,
il nous entraîne dans un monde imaginaire : le Klokochazia.
Une terre dasile où le chanteur lave son vague à
lâme à coup de klokobetz. Une composition perso.
Une espèce de dialecte afro-anglais qui permettrait de révéler
le subconscient. Certains avaient bien inventé le kobaïen,
en dautres temps.
Comme Magma, Nosfell fait surgir un imaginaire pour nourrir la musique.
Cette langue lui permet de toucher à des tessitures et des
sonorités quil nobtiendrait ni en français,
ni en anglais. Le résultat : des voix multiples dont il joue
tel un contorsionniste, conjuguant aussi bien le rock que la pop,
le folk que le blues. Car ce créateur que subjuguent Neil Young,
tout comme Jeff Buckley, Ben Harper ou Bill Frisell, use de sa voix
comme instrument à part entière, passant en quelques
secondes du registre du baryton à celui du haute-contre. Le
garçon peut ainsi obtenir le timbre dune gamine de dix
ans et passer la minute suivante à la voix éraillée
dun Tom Waits. Plutôt spectaculaire. Dautant plus
que pour donner davantage de profondeur à ses chansons, lartiste
enregistre en live des boucles de voix et de guitare. Vigoureux comme
un acteur de nô japonais, Nosfell exploite la scène comme
personne. Etonnant personnage il devient femme, enfant, vieillard,
serpent.
A larrivée, un concert inoubliable, qui ne repose que
sur la performance incroyable de ce lutin farfelu qui a déjà
fait la première partie des Pixies et des Red Hot Chili Peppers
au Parc des Princes. Et remporté le prix du public et celui
du jury au Starting rock du festival Chorus des Hauts-de-Seine, et
les prix Attention talent scène et Découverte du Printemps
de Bourges. Excusez du peu ! Pourtant, le succès ne lui monte
pas à la tête. Nosfell est un original et il le restera.
En témoigne la sortie de son premier un album, Pomaïe
Klokochazia balek. Autoproduit.
Isabelle Pauty, Mairie de Nanterre
Vendredi 10 juin à 20h30
Salle Daniel-Féry
10-14, bd Jules-Mansard
Réservations : 01 41 37 60 90